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Antivax et radicalisation

Environ 9 % d'antivax en France : 6 millions de personnes

C'est dans Karen Horney que j'ai été chercher des réponses à la question : "Comment se fait-il qu'il existe tant de personnes antivax dans notre société" ?. Sa réponse : notre société fabrique ce type d'opposants.


Une culture ambiante névrogène

Pour une sociologue comme Karen Horney, notre culture actuelle propose aux Hommes un schéma unique et précis de situations prégnantes. Cette situation typique est structurée par les éléments suivants :

- la compétition omniprésente,

- la mise en échec rencontrée et,

- la défiance provoquée envers nos semblables.

(La personnalité névrotique de notre temps, (1945), rééd. L'Arche, 1997).

Pour elle, ce type de situations crée chez une majorité des Hommes, une "anxiété interactionnelle de base" car, face à ce type de situation que lui propose sans arrêt sa culture, notre contemporain acquiert la peur de l'échec, notamment dans ses relations affectives et, aussi et surtout, une défiance profonde envers les autres, ceux qui provoquent d'une manière sournoise, ses échecs.


Les réactions défensives face à l'anxiété

Pour faire face à cette situation culturelle typique, l'Homme contemporain, nous dit Karen Horney, a développé des "attitudes névrotiques". Névrotiques parce que ne participant pas de sa "vraie nature" et le rendant donc mal à l'aise (d'où l'impression éprouvée de malaise). Ces attitudes fondamentales concernent le don et la recherche d'affection, l'estime de soi, l'agression et l'affirmation de soi.


Les réactions névrotiques développées sont des stratégies d'évitement de l'angoisse qu'ont fait naître les situations d'échec dans les compétitions toujours rencontrées. Ces stratégies sont d'abord centrées sur des besoins défensifs de protection et de retrait :

- le besoin névrotique d'affection et d'approbation,

- le besoin névrotique d'être pris en charge et,

- le besoin névrotique de se retirer de la vie.

Autant donc de besoins réparateurs de sécurisation et de protection.

D'autres stratégies sont ensuite centrées sur des besoins offensifs et d’expansion :

- le besoin névrotique de pouvoir,

- le besoin névrotique de prestige, d'admiration, de réalisation personnelle, d'indépendance et,

- le besoin névrotique d'avoir raison.

Autant donc de besoins compensatoires de négation des échecs à travers une valorisation.


Une même situation traumatisante et s’imposant avec force à divers instants de l’existence (surtout dans l'enfance et l'adolescence), va donc être à l’origine de réactions diverses se cristallisant en attitudes pathologiques. Les formes différentes des réactions s’expliquant par le fait que chaque individu trouve la réaction qui lui paraît la plus pertinente face aux spécificités de la situation particulière ressentie.


À l'écoute des antivax

Voici un florilège de propos des antivax repérés à travers leurs apparitions dans des reportages télévisés, notamment dans le documentaire : "Antivax : les marchands de doute", diffusé sur Arte, le mardi 21 décembre 2021 :

- le vaccin est un génocide déguisé,

- le Covid n'existe pas,

- le vaccin est destiné à tracer nos déplacements,

- le vaccin a des effets secondaires puissants, néfastes et on nous le cache,

- les données sur les résultats du vaccin sont manipulées,

- on a le droit de décider librement de notre vie,

- le Covid est une invention des Big Pharma pour faire de l'argent sur notre dos,

- ils veulent nous dire quoi penser,

- le vaccin menace notre liberté,

- je ne veux pas de corps étranger en moi,

- c'est un complot avec les labos pour nous assujettir,

- la vraie médecine, c'est la nature et le bio. Tout ce qui est sain,

- les labos ont pourri notre santé et maintenant ils veulent s'enrichir sur nous,

- le Covid, c'est comme un rhume et on n'en meurt pas,

- ils veulent nous faire rentrer dans un ordre mondial,

- il faut sortir du système imposé et penser différemment,

- il faut défendre nos libertés attaquées,

- soyons tous des résistants,

- ...


Une réaction défensive cohérente avec le ressenti

Il apparait trois thématiques dans les expressions des antivax :


1°) La défiance face aux mensonges

Tout est faux, on nous ment, on ne peut pas avoir confiance : le Covid n'existe pas, c'est une invention, c'est au pire comme un rhume; les vrais résultats et les effets néfastes nous sont cachés... Les vraies raisons de cette pandémie orchestrée sont ailleurs (nous assujettir, nous faire disparaître, nous exploiter...)...


2°) Une manipulation ressentie

On veut nous tracer, voire nous faire disparaitre au bénéfice de certains. Ce sont les labos qui veulent nous exploiter et s'enrichir. On veut nous assujettir, nous faire rentrer dans l'ordre, nous dire quoi penser...


3°) Le droit et la nécessité de défendre sa liberté individuelle mise en cause.

On est dans notre droit vital : il faut résister et défendre notre liberté mise en cause par la pression vaccinale vectrice d'un complot mondial. Il faut sortir de ce qui nous est imposé, il faut penser différemment et privilégier la nature, le bio, le sain...


Les antivax n'ont pas confiance dans leurs semblables et dans la société en général (1°). Cette défiance acquise est capitale car c'est sur elle que se greffe le sentiment permanent de manipulation (2°) puis, ensuite, la réaction défensive agressive (3°) de rejet du vaccin, des résultats scientifiques, des labos, des vaccinés, des médecins, des centres de vaccination, des journalistes porteurs du regard dépréciatif des autres citoyens.


Un genre de perdants de la société moderne ?

Les antivax se présentent comme des personnes ayant vécu d'une manière traumatique des situations de compétitions perdues : dans leur vie familiale enfantine, à l'école, dans leur carrière professionnelle, lors de recrutement et de sélection, dans des réalisations techniques, dans leur vie amoureuse... Ces personnes ont alors éprouvé de très forts sentiments d'injustice et de dévalorisation se cristallisant en défiance envers des personnes ou des institutions jugées responsables de leur défaite. Nous nous retrouvons dans les cas analysés par Karen Horney.


Le besoin d'affection et d'approbation : les antivax le trouvent dans la communauté qu'ils construisent. Ils se regroupent d'abord sur internet, puis dans les rues, ils attaquent alors leurs boucs émissaires désignés : les centres de vaccination, les pharmacies, les hôpitaux, les reporters..., le Reichstadt (pour les antivax allemands par exemple).


Le besoin de prestige et d'admiration : les antivax le trouvent dans la posture valorisée qu'ils prennent. Ils exhibent fièrement partout cette posture (dans la rue face aux caméras, sur les plateaux télé, sur internet, dans les discussions individuelles...) : ils sont, non seulement des "rebelles", mais des "résistants" (cf. leurs inscriptions sur le mur du mémorial du Mont Valérien à la France combattante), voire des "éveillés" qui voient mieux que tous la réalité des choses : eux, ils échappent à la Matrice.


Le besoin d'avoir raison, les antivax le cultivent en fouillant internet à la recherche des "vraies raisons" de leur défiance. Ils sautent sur le moindre indice négatif suggéré dans un article scientifique. Ils interprètent de travers des résultats d'expérience. Ils adulent et suivent les conférences des quelques médecins qui expriment des doutes : Andrew Wakefield (rayé de l'ordre des médecins en Angleterre), Philippe de Chazournes (soutien des antivax à Saint Denis) ou Louis Fouché (le "docteur antivax" pour qui "le vaccin est un viol")...


Une nouvelle forme de radicalisation ?

La personnalité antivax est une forme mineure mais certaine de radicalisation. Les radicalisations diverses participent désormais des sociétés du XXIème siècle : "le XXIème siècle sera religieux ou ne sera pas", disait André Malraux pour globaliser le constat.


Rappelons que le radicalisé est une personne dont le psychisme est totalement envahi par une idée fixe ou un nombre restreint et cohérent d'idées fixes. Ces idées fixes sont soutenues par un ensemble de croyances extrêmement fortes, ancrées au plus profond de sa personnalité car acquises par imprégnation affective lors de situations traumatiques s'étant imposées dans le parcours de vie. Ces croyances apportent des arguments justifiant sans cesse les idées fixes et les conséquences comportementales qui en découlent. Ces croyances ne peuvent être mise en cause. Elles s'imposent comme des vérités fondamentales de l'être au monde du radicalisé. Elles structurent sa personnalité. Ces croyances fonctionnent aussi comme filtre et grille de lecture interprétative de tout ce qui peut se passer dans l'environnement de la personne radicalisée. D'où notre impression d'impossibilité de communiquer avec les antivax : ils ont toujours raison, nous ne sommes que des aveugles inconscients transformés en persécuteurs. Guérir quelqu'un d'une névrose est un long travail psychologique hors de notre portée.


Conclusion

Il reste à régler la question des leaders des antivax : Andrew Wakefield, Philippe de Chazournes ou Louis Fouché... Sans doute d'autres névrosés à la recherche d'admiration et de gloire compensatrices ? Il reste aussi à qualifier les politiques à la Florian Philippot et à la Nicolas Dupont-Aignan ou encore ceux qui ne veulent pas prendre partie pour la vaccination et restent évasifs sur sa nécessité... Pour ceux-là chacun avisera.



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