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Le perfectionniste, le looser et le suiveur : les hommes face au risque d'échec


Pour la plupart des psychologues, l'homme naît évidemment avec quelques besoins biologiques de base : faim, sécurité, soif, sexuel... Mais surtout, ces tendances naturelles sont largement travaillées et réécrites par son milieu affectif. À sa naissance l'homme serait donc proche d'une « tabula rasa ». Ce sont essentiellement les expériences de la vie qui vont écrire sur cette page vierge et façonner les façons de voir et de réagir de l’individu. L'individu est donc le résultat conditionné de son passé et, plus précisément, il est marqué par les expériences traumatisantes de son vécu enfantin. La théorie des "complexes personnels" est intéressante de ce point de vue.

1- La formation des complexes personnels

Un "complexe" est le résultat d’un traumatisme affectif de l’enfance lié à une situation particulière. Cette situation est directement traumatisante affectivement ou bien elle est répétitive et crée un climat psychologique émotionnel durable.

Dans les deux cas, le vécu affectif façonne une sensibilité très forte au même genre de situation que celle vécue. Cela veut dire que lorsque la personne se retrouvera dans le même genre de situation, elle retrouvera automatiquement le même état émotionnel fort. Un "complexe" s'est imprimé en elle. Le complexe fonctionne donc en interprétant la réalité. il sélectionne certains éléments des situations et transforme la totalité perçue dans le sens de ses émotions. Le complexe est le générateur d'un sens déformé.

Ce "complexe" est également constitué de réactions comportementales typiques. Elles ont été inventées, avec plus ou moins de réussite, par la personne pour se sortir de son état émotionnel. Lorsque cette personne retrouve le même genre de situation, elle mettra alors en œuvre les mêmes conduites réactionnelles pour faire face à la situation. Les réactions que la personne inventent peuvent être très différentes. On distingue en effet, quatre modalités d'expression du complexe : les formes non compensées, compensées, surcompensées ou sublimées.

2- Exemples de complexes et de réactions complexuelles

Le perfectionniste

Les parents, croyant être stimulants, répètent sans arrêt à l’enfant, sur une très longue période, des jugements de définition de lui dévalorisants : « tu es un idiot, un incapable, tu ne feras jamais rien de bon, voilà encore une bêtise, ... ». Une fois adulte, la personne est très sensible à tout élément de jugement dévalorisant. La dévalorisation est aussitôt généralisée et envahie toute la situation. Cette personne ne supporte pas de pouvoir être critiquée dans son travail. Dans ses réactions complexuelles compensées, elle va au devant de toute possibilité de jugement négatif. Elle les neutralise à l'avance par un travail acharné qui va bien au-delà de ce qui lui est demandé. La personne devient perfectionniste. Sa motivation au travail est donc à rapporter à la situation dévalorisante de son enfance qui est désormais compensée dans sa vie adulte.

Le looser

Voilà un enfant, dernier de sa fratrie, qui est sans arrêt confronté à des situations et à des problèmes que ses ainés peuvent réaliser alors que lui est toujours mis en échec sans que ses parents n'interviennent jamais. Il est sans arrêt humilié et moqué pour son incapacité à faire les choses qu'il ne peut pas faire. Une extrême sensibilité aux situations trop difficiles pour lui se développe. Il développe un "complexe d'échec". Ce complexe lui fait interpréter toutes les situations vécues comme des situations à risque.

Face au risque alors omni présent et à sa peur, il peut développer une réaction dite "non compensée". Sa peur génère une série de conduites qui le mènent, justement à l’échec redouté. Il perd ses moyens (il tremble, il rougit...), son jugement se trouble, il oublie ce qu'il a appris, il fait justement ce qu'il ne faut pas faire... Dans ce genre de situations son incapacité est donc vérifiée. Cette nouvelle infériorisation le renforcera dans sa certitude d'être inférieur dans toutes les situations. Dans ce cas du complexe non compensé, le complexe se nourrit alors de la prédiction qu'il réalise.

Le supérieur et le narcisse

Dans la forme surcompensée du complexe d'échec, l'individu va tout faire pour surmonter les risques fantasmés d'échec et atteindre la supériorité dans la voie même où se situaient ses échecs. Les conduites de surcompensation peuvent être aussi bien intentionnelles et volontaires, qu'automatiques et inconscientes. Elles produisent alors le « complexe de supériorité » (je suis, de toute façon, plus fort que vous), ou le « complexe spectaculaire » (regardez comme je suis le plus fort), ou encore le « narcissisme » (je suis tellement heureux d'être le plus fort). L’individu n’a de cesse de montrer qu’il est le plus fort et de faire admirer sa réussite dans le domaine. Sa « motivation » en ce sens est inextinguible car elle est nourrit en permanence par le complexe toujours présent.

Le suiveur ou le contestataire

Dans sa forme sublimée, le complexe d'échec peut donner une philosophie de l'infériorité et de l'échec, métamorphosée en valeur sociale : se battre entraine la lutte de tous contre tous, ce n'est donc pas la peine. Il vaut mieux se mettre au service complet d'une cause ou d'un personnage fort, ce sont eux qui prendront les coups. Le même complexe d'échec peut donner, à l'inverse, une rationalisation de la revendication de puissance et d'agressivité pour éviter toute possibilité d'échec : il faut se réunir et se battre contre les puissants qui monopolisent tous les biens, les situations favorables et les pouvoirs. C'est en faisant corps contre eux que l'on évitera de se faire écraser car c'est ce qu'ils cherchent. Le complexe est là encore une instance psychologique qui interprète de son propre point de vue les éléments du monde. Le complexé ne peut avoir une vision réaliste des choses et ne peut échapper aux conduites rituelles qu'il a mises en place pour neutraliser ses interprétations.

3- Conclusion

Les grands théoriciens de la psychologie : Freud, Adler, Hesnard, Lacan... ont chacun mis l'accent sur une des situations possiblement marquantes de l'enfance : la situation de "castration" pour Freud, la situation d'infériorité pour Adler, la situation de culpabilité pour Hesnard, la situation de rivalité pour Lacan... Mais, au-delà de ces différences d'attention aux situations marquantes de l'enfance, les principes de référence de ces psychologies sont les mêmes. On peut les formuler ainsi :

1°) Tout individu rencontre dans son enfance des situations qui vont le marquer affectivement (postulat de l'existence de situations traumatisantes).

2°) Ces situations laissent des traces affectives indélébiles (postulat de l'empreinte affective).

3°) Les traces affectives laissées orientent sa sensibilité au monde, ses attitudes et ses réactions ultérieures (postulat de l'interprétation affective).

4°) L'individu tire des règles de vie de ces situations traumatisantes vécues (postulat de la formation des motivations comme règle de vie).

Bien entendu, cette théorie génétique des motivations acquises est incomplète car elle ne tient pas compte des déterminants motivationnels qui sont issus des autres niveaux constitutifs de l'individualité, en particulier les déterminants issus des niveaux biologiques, culturels et idéels.

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