Les 7 facteurs clés du succès d'une formation digitale et leur mesure
Introduction
Il existe plusieurs méthodes pour évaluer la qualité et la performance d'un e-learning ou d'une formation distancielle et digitale. Il existe même des Institutions qui délivrent des "labels qualité" pour les e-learning. À l'heure de la digitalisation des formations, le souci de la conception-réalisation de cours distanciels de qualité est tout à fait normal. Je vais proposer, ici, une méthode, directement fondée sur les attentes des apprenants.
Une étude de Talentsoft/ISTF nous livre les facteurs clés du succès d'une formation digitale en passant par l'intermédiaire de l'engagement des apprenants.
Comme on le voit sur le diagramme, l'engagement des apprenants dans la formation dépend d'un ensemble de facteurs fonctionnant en synergie. Si nous explicitons un à un ces facteurs, nous allons avoir les divers éléments dont il faut tenir compte pour concevoir et réaliser une formation digitale pertinente. Nous avons alors tout ce qu'il faut pour construire les différentes échelles d'évaluation qui entrent en jeu dans l'évaluation globale d'une formation digitale.
1- La qualité du contenu brut
La valeur du contenu des apprentissages proposés est donc primordiale. Les apprenants ne se laissent pas berner par l'enrobage technologique. Ils veulent d'abord une offre intellectuelle qui ait du répondant et ils savent la reconnaitre. Le fond de la proposition d'apprentissage compte beaucoup. Les apprenants veulent être entrainés par la compétence de l'expert du contenu. Ils doivent sentir avec évidence que ce concepteur-pédagogue connait son affaire et sait trouver les bonnes manières de faire comprendre son apport. Évidemment, le contenu proposé doit être adapté au niveau des groupes d'apprenants. Les éléments de l'évaluation de cette qualité du contenu sont au nombre de 5 et sont les suivants :
a- La présentation de la compétence du concepteur du contenu
Le concepteur (ou le groupe d'experts) ne doit pas rester un inconnu. Il est présenté rapidement aux apprenants. C'est le premier élément d'une "confiance" que peuvent avoir les apprenants dans le contenu.
b- La logique pédagogique de la progression dans le contenu
Cette logique est claire et explicite. Un plan de la progression et un résumé de l'objectif d'apprentissage sont proposés. Quelle est sa qualité ? Elle dépend de la bonne conception de la structure de l'exposé. Elle est appréhendable à travers la clarté du synopsis du cours qui déplie les sous-objectifs et les sous-sous-objectifs à parcourir.
c- Les explications données sur les liaisons entre les sous-objectifs
Le fil de la découverte des apports faits dans le contenu doit toujours être rappelé. Et ce d'autant que l'apprenant peut avoir quitté la formation pour y être revenu plus tard. Le pédagogue se soucie en permanence de la compréhension du parcours qu'il propose. Nous verrons que ce souci se concrétise en particulier dans le questionnement régulier qui soutient en permanence la progression de l'apprenant dans la formation.
d- Les synthèses et résumés intermédiaires soulignant l'importance de ce qui vient d'être vu
Chaque apport clé, scandé par chaque étape de la progression dans le cours, est valorisé par un commentaire faisant souvent référence aux applications qui vont en découler. Les apports du pédagogue ne sont pas gratuits. Ils ont de l'importance. Cette importance est aussi soulignée par une interactivité spécifique liée à des exercices et à des questionnements qui vont faire réfléchir l'apprenant.
e- Une interrogation des apprenants sur l'importance des apprentissages apportés par la formation
Pour bien ancrer les savoirs ou les compétences apportées chez l'apprenant et pour le persuader qu'il a appris des choses intéressantes, rien ne vaut un questionnaire lui faisant classer l'importance des différentes notions abordées. À travers ce questionnaire, c'est l'occasion de lui faire remettre le doigt sur l'intérêt et la qualité de ce qu'il vient d'apprendre. C'est l'obliger à réfléchir rapidement sur le fond du contenu qui lui a été proposé. Lorsque du présentiel est intégré dans la formation digitale (en blended learning, par exemple), l'animateur de la séance présentielle fait avec les stagiaires la revue des notions et idées les plus nouvelles, performantes, surprenantes..., qui viennent d'être étudiées. Il fait alors expliciter les raisons de tel ou tel intérêt pour telle ou telle notion. Cette interrogation peut se transformer en commentaires pédagogiques faits par le e-tuteur dans le social learning qu'il anime sur le LCMS. De la même manière, le e-tuteur pourra mettre sur le social learning des posts et des vidéos qui donnent des exemples concrets des notions abordées.
2- L'interactivité
La partie distancielle et digitale de la formation doit intégrer diverses formes d'interactivité. L'apprenant ne veut pas être passif et se retrouver devant une formation descendante. Habitué aux jeux vidéos et aux multiples choix tactiles des Smartphones, il souhaite participer intelligemment et d'une manière ludique, si possible, à son apprentissage. Les technologies de la formation digitale nous offrent diverses façons d'introduire de l'interactivité.
a- Les questionnements sur les diverses parties des apprentissages proposés
Les outils auteur proposent tous la possibilité d'insérer des questions dans le déroulé d'un e-learning. Le questionnement pousse l'apprenant à réfléchir et à s'impliquer. Il est un complément important à la compréhension des apprentissages proposés car il utilise une variétés de formes faisant appel aux divers processus cognitifs de Bloom. Si ce questionnement est gamifié, l'apprenant pourra être encore plus impliqué dans le gain de points, de badges et dans la possibilité d'afficher ses performances. Le questionnement, à travers les commentaires pédagogiques qui sont faits aux réponses, donne la possibilité au concepteur-pédagogue de mettre au point des parcours différenciés en fonction des erreurs faites.
b- Les exercices et jeux d'application et leurs corrigés
Les questionnements et quiz peuvent être doublés par de petits exercices, plus ou moins ludiques, sollicitant la mise en œuvre des notions du cours e-learning. C'est à travers les réponses que donne l'apprenant que se fait l'interactivité. Interactivité renforcée par de petites animations expliquant les solutions ou faisant des commentaires concrets. Nous reverrons comment la méthode pédagogique utilisée (méthode de la découverte, simulation, méthode socio-constructiviste), introduit aussi de l'interactivité en demandant à l'apprenant d'intervenir pour construire son apprentissage.
c- Les serious game et leur débriefing
Les mises en scènes, réalistes ou fictionnelles, des serious game proposent de l'interactivité dans les choix des actions à faire face aux situations présentées. Par ailleurs, chaque action faite par l'apprenant est enregistrée et donne lieu à une notation et à un commentaire pédagogique.
d- Le suivi des apprenants et les commentaires du e-tuteur
Les plateformes actuelles permettent le suivi des activités de chaque apprenant. Ainsi, le e-tuteur peut interpeler tel ou tel apprenant sur sa navigation et sur les résultats qu'il obtient aux questionnements et aux tests répartis sur son parcours.
e- Les échanges du e-tuteur sur le social learning avec les apprenants
L'espace de social learning du LCMS permet au e-tuteur d'animer des échanges avec les apprenants. Sur cet espace, il poste divers liens, diverses vidéos et autres ressources qui peuvent intéresser les apprenants. Il peut fixer des rendez-vous collectifs et animer des discussions sur tel ou tel thème.
3- La démarche pédagogique
La démarche pédagogique se distingue de la méthode pédagogique adoptée dans les e-learning de la phase distancielle. En ce qui concerne ces méthodes pédagogiques, nous savons que les e-learning actuels privilégient les méthodes actives : méthode de la découverte, méthode de simulation, jeux divers, méthode utilisant le social learning et le co-développement, méthode socio-constructiviste... Ces méthodes, comme nous l'avons vu, font appel à l'activité de l'apprenant. La "démarche pédagogique", quant-à elle, concerne l'agencement de différentes phases du processus d'apprentissage : cours digital et ses supports d'accès, e-tutorat, social learning collectif, séminaire présentiel, tests divers, exercices, classe virtuelle, groupes de travail distanciels ...
Un exemple de démarche pédagogique en blended learning
La prise en compte de cette démarche pédagogique nous rappelle que l'évaluation d'un e-learning se fait aussi en rapport avec l'environnement pédagogique dans lequel il est inséré. Il fait toujours partie d'un éco-système pédagogique dans lequel le système technologique (le LCMS) entre aussi en ligne de compte. Cet éco-système étant évalué à travers divers éléments passés en revue dans cet article.
Comme on le voit sur le schéma ci-dessus, les concepteurs-pédagogues ont un large choix dans l'agencement des phases d'apprentissage. Les éléments de l'évaluation de la qualité de la démarche pédagogique sont au nombre de 4 et sont les suivants :
a- L'intérêt et la variété des supports informatiques disponibles pour le cours distanciel
À l'heure du mobile learning et du rapide learning, les apprenants apprécient la disponibilité des cours distanciels sur leurs Smartphones ou leurs tablettes.
b- La variété et la bonne répartition des phases du processus global d'apprentissage proposé
La démarche totale du processus d'apprentissage proposé doit garantir la motivation permanente des apprenants dans une dynamique prenante. Rien ne doit être ni trop long, ni trop espacé, ni trop décalé... L'adaptation au groupe des apprenants est le maître mot. Le séquençage du processus est réalisé en tenant le plus grand compte des caractéristiques culturelles et cognitives des apprenants.
c- La cohérence de la démarche proposée
Chaque phase du processus global d'apprentissage proposé vient au bon moment et s'insère bien dans la progression. Par exemple, telle "classe virtuelle" est bien en relation avec la thématique abordée dans la phase précédente (un exercice d'application, par exemple) ; tel séminaire présentiel est bien en relation avec les cours digitaux précédents ; tel test de connaissance arrive au bon moment du processus ...
d- Le bon pilotage de la démarche pédagogique et les capacités d'adaptation de la démarche
Il y a, non seulement une administration globale du groupe des apprenants, mais aussi un suivi général de la progression du groupe des apprenants dans le processus global de formation. Un responsable pédagogique (qui peut être le e-tuteur), suit la progression d'ensemble, apprécie les difficultés rencontrées et est capable de proposer une intervention correctrice nécessaire.
4- Le tutorat
Il a été démontré que sans e-tutorat pour les phases distancielles de la démarche pédagogiques de formation digitale, le e-learning était démotivant et menait à l'abandon des apprenants. La qualité du suivi tutorial dans une formation digitale est donc importante.
Par ailleurs, nous savons que les fonctions du e-tuteur sont diverses (Jacques Rodet). Nous les regroupons ici en trois grands rôles.
Pour chacun de ces rôles, il faudra donc examiner la qualité du suivi et des interventions.
a- Qualité de la tenue du rôle organisationnel par le e-tuteur
Le e-tuteur doit accueillir, orienter dans la navigation et le choix des cours et aussi assurer les conseils techniques. Il le fait, comme pour tous les autres rôles avec empathie et bonne humeur. Il est celui qui rassure et que l'on sait se tenir à disposition pour pallier les événements perturbateurs qui pourraient arriver.
b- Qualité de la tenue du rôle pédagogique par le e-tuteur
Ce rôle est évidemment important. Il motive par ses interventions et commente les évaluations pour soutenir les efforts de l'apprenant. Il assure le lien pédagogique avec l'apprenant, lien qui doit être un lien chaleureux et de confiance. Il est le référent aimable et toujours positif qui accompagne dans la formation.
c- Qualité de la tenue du rôle socio-cognitif par le e-tuteur
C'est là un rôle qui se déroule en même temps que les autres. Il fait comprendre à l'apprenant quels sont les ressorts les plus forts de son apprentissage ; il se sert des évaluations pour orienter les efforts de l'apprentissage du tutoré ; il explique et conseille sur le contenu. Il est le mentor et le précepteur attentionné de l'apprenant.
5- L'agenda de la formation
Cet agenda doit être adapté aux tâches métier, nous disent les résultats de l'enquête. Cette adaptation est d'abord en relation avec la démarche pédagogique, puisque nous avons vu que cette démarche était composée de "phases" diverses d'apprentissage. Chacune de ces phases doit alors être répartie selon un calendrier qui tient compte du rythme du travail métier des apprenants. Tout doit être fait dans cette organisation pour que les apprenants aient le moins possible d'efforts d'emploi du temps à faire pour suivre la formation.
Des supports technologiques mobiles, comme les Smartphones et les tablettes, peuvent faciliter les apprentissages en faisant en sorte que les cours digitaux soient accessibles en tout temps et en tout lieu (mobile learning).
6- L'ergonomie, l'expérience utilisateur et le webdesign
L'ergonomie d'usage
Le confort et la facilité de la navigation ainsi que l'efficacité des manipulations et des interactivités proposées dans les cours e-learning, doivent être parfaitement adaptés aux apprenants et aux objectifs d'apprentissage.
L'ergonomie cognitive des cours e-learning
Les processus mentaux sollicités dans les apprentissages doivent être adaptés aux objectifs pédagogiques visés mais aussi aux capacités intellectuelles et aux habitudes mentales des apprenants. La charge mentale exigée par les apprentissages proposés ne doit jamais susciter de stress chez les apprenants. Au contraire, des émotions positives liées à la découverte et au jeu, doivent, si possible, être appelées. On sait comment l'attention et, donc, les apprentissages sont favorisés par les émotions positives liées aux mises en scènes.
L'expérience utilisateur (UX : expérience de l'utilisateur)
L'expérience utilisateur qualifie le bénéfice et le ressenti de l'apprenant lors de sa navigation dans le e-learning. Compte tenu de ce que nous avons dit sur les performances que doivent avoir l'ergonomie d'usage et l'ergonomie cognitive de l'e-learning, cette expérience utilisateur doit être maximale.
Le webdesign
Il doit aussi être de qualité. Ce webdesign dépend des éléments que nous venons de citer ci-dessus. Il faut y ajouter la qualité des dessins, des animations, des couleurs..., du graphisme en général. Tous ces éléments doivent concourir aux performances pédagogiques du e-learning.
7- L'expérience sociale de la formation
Nous avons vu que cette "expérience sociale" que les apprenants appellent de leurs vœux était présente sous quatre formes dans la démarche pédagogique canonique proposée : 1°) les interventions du e-tuteur ; 2°) les échanges entre pairs sur l'espace du social learning ; 3°) les regroupements présentiels, et, 4°) le coaching des travaux d'application en groupe. Les évaluations de cette "expérience sociale" de la formation se font donc à travers l'évaluation de la qualité de l'animation de ces quatre phases. Ces animations doivent favoriser et renforcer les échanges entre les apprenants pour qu'ils puissent apprendre à travers ces échanges.
Conclusion
Le succès d'un e-learning dépend essentiellement de quatre grands facteurs : la qualité du contenu, l'interactivité introduite, la démarche pédagogique utilisée et le tutorat mis en place. Les trois autres éléments signalés dans les attentes des apprenants étant de moindre importance.
Comme nous l'avons vu, chacun de ces sept facteurs est décomposable en éléments constitutifs. Pour chacun de ces 27 éléments, nous pouvons construire une échelle d'évaluation progressive en plusieurs points. L'ensemble des échelles et la sommation des points obtenus nous donneront une mesure de la qualité globale de l'e-learning et donneront une indication prédictive sur ses chances de succès auprès des apprenants, puisque répondant plus ou moins à leurs attentes.